• Les structures élémentaires de la parenté - Claude Lévi-StraussDans un autre article de ce blog, je présentais Claude Lévi-Strauss, le célèbre anthropologue comme le "Pape du Structuralisme", ce courant de pensée qui cherche la signification des choses dans les choses elle-mêmes (dans des structures cachées) et non dans le contexte ou l'Histoire !

    Mais l’œuvre majeure qui introduit le Structuralisme est un ouvrage qui étudie les liens familiaux entre les individus, et qui s'intitule Les Structures élémentaires de la parenté - où il est notamment largement question de l'interdit de l'inceste. Ce livre fut publié en 1949 et est la thèse de Lévi-Strauss de 1948. Il y est aussi abordé les problématiques des échanges entre les groupes sociaux.

    La première partie de l'ouvrage est plus philosophique puisqu'on y parle des rapports entre Nature et Culture, loin des théories physiologiques ou psychologiques de l'époque. On est bien ici au cœur d'une certaine sociologie aussi !

    Comment apparaît le lien social ? Comment se gèrent les conflits ? Ce sont les points d'approche de Lévi-Strauss.

    Il s'agit donc aussi de formuler une opposition plus nette entre Nature et Culture. La Nature est universelle alors que la Culture est particulière à chaque groupe social. Cependant, parmi ces normes culturelles, le tabou de l'inceste - et son interdiction - revêts un caractère universel ! Pour le dire rapidement, créer des unions au sein d'une même famille revient à s'interdire de nouer des alliances avec d'autres groupes sociaux, en dehors du clan et donc enlève une possibilité d'apaiser des conflits !

    L'interdit de l'inceste, dans les peuples dits primitifs - en Amazonie particulièrement, terrain d'étude de l'auteur, mais aussi un peu partout dans le monde - requiert une intervention des organes dirigeants - par la voie de décrets individuels ou de règles générales plus ou moins explicites. Il s'agit d'un état d'équilibre et les échanges sont réglés aussi.

    Lévi-Strauss reprends des éléments de Marcel Mauss et introduit deux observations :

    - l'échange, dans les société archaïque, est un don (et contre-don) et n'est pas seulement économique.

    - Il s'agit de "prestations totales" et les femmes apparaissent comme des objets d'échange. Il s'agit d'empêcher que des "monopoles" se constituent ou des pères et des frères s'approprieraient des "cheptels" en mettant la main sur les filles et les sœurs.

    Les structures de la parenté sont donc liées aux formes de l'échange. Reste à savoir avec qui cette échange est licite et c'est ce que ce demande Claude Lévi-Strauss.

    Ici, notre anthropologue/ethnologue s'oppose à la théorie fonctionnaliste de Radcliffe-Brown et apporte une théorie structuraliste !

    Dans le livre, l'auteur- après une introduction en deux chapitres, présente dans deux parties, l'échange restreint puis l'échange généralisé, présente d'abord à chaque fois la théorie puis l'illustre sur de nombreux exemples tirés de la littérature de ce domaine scientifique mais surtout de ses observations de terrain. Le modèle théorique est prescriptif mais les sociétés primitives ne parviennent pas toujours à s'y conformer.

    Le mariage est "une  rencontre dramatique entre la nature et la culture, entre l'alliance et la parenté". Qui a donné la fiancée ?

    Avec ce livre, Claude Lévi-Strauss veut poser une théorie formelle aussi assurée que le sont les théorèmes mathématiques mais les difficultés liées aux sources et à la complexité du modèle lui firent abandonner ce projet. Il n'en reste pas moins qu'il posa les premières pierres du structuralisme dans lequel le suivirent Roland Barthes ou Louis Althusser dans leurs domaines propres.

    Ce structuralisme fut la vision dominante dans les années 1960 avant d'être finalement très critiqué par la suite, notamment par les penseurs Post-modernes ! Pour ma part, je crois qu'on ne peut jamais exclure totalement le contexte dans une étude, notamment de texte littéraire pour prendre un seul exemple - encore qu'on vous dirait que ce contexte de lecture n'est pas stable car mouvant en fonction des époques !

    A bientôt !


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  • Nous allons maintenant aborder un ouvrage de médecine/psychiatrie d'un éminent professeur et praticien hospitalier dans ce domaine, Édouard Zarifian, disparu en 2007 - et que, par ailleurs, j'ai eu l'occasion d'approcher - parce que j'ai fait un burn-out à un moment de ma vie et qu'il vivait  à Ouistreham, par chez moi ! Ce livre s'appelle Les Jardiniers de la folie, paru chez Odile Jacob !

    Les jardiniers de la folie - Edouard ZarifianÉdouard Zarifian est un psychiatre qui, du haut de sa grande expérience, se montre très critique à l'égard du système de soin en santé mentale  - où on supprime aussi des lits comme dans les autres secteurs médicaux  - et il est d'autre part très sensible à la souffrance des malades et de leurs familles !

    En 1996, il fut nommé par le ministère de la santé en charge d'une étude sur la consommation de psychotrope en France. Il pointe un fait bien connu depuis : à savoir une surconsommation !

    La folie dérange, elle effraie, interpelle... Chacun sera confronté au moins une fois dans sa vie à la pathologie mentale - pour un proche, sinon pour lui-même ! Mais qui sont ceux que l'on qualifie de "fous" - terme qui n'a pas de sens de nos jours !? Zarifian démolit un certain nombre de clichés !

    il faut dire que les médias n'aident pas et font leur gros titre sur les "fous criminels" ! Cela fait vendre du papier mais ne reflète pas la réalité ! Il n'y a proportionnellement pas plus de gens dangereux parmi les malades psychiques que dans la population générale ! Il y aurait même tendance à y en avoir moins ! Seulement, "évidemment" lorsque ce que l'on appelle un "acte médico-légal" est commis, c'est plus spectaculaire du fait de la "décompensation psychotique" !

    Dans les faits, les "fous" sont plus des victimes qui en plus de souffrir d'une pathologie, sont "étiquetés", casernés Les jardiniers de la folie - Edouard Zarifiandans des foyers, envoyés dans des ESAT/CAT qui sont autant de voies de garage ! J'en sais quelques chose !

    Le bon professeur insiste sur l'approche actuelle de la psychiatrie qui est organique à l'heure des neurosciences ! Là encore, je connais car j'ai une maîtrise de neurosciences en formation initiale ! On veut tout expliquer par un déterminisme biologique - qui nie toute marge de manoeuvre au malade ! Les diagnostics tombent comme des couperets et on vit ensuite avec une Epée de Damoclès ! En réalité, on ne sait pas trop comment fonctionnent ces maladies ni comment les médicaments agissent !

    Sans recourir au domaine de la psychanalyse, qui concerne plus le traitement des névroses, Zarifian plaide pour plus d'empathie avec le malade, l'écoute, la main tendue, la confiance avec le soignant et la compassion !

    Enfin, le "cas" de l'industrie/lobby pharmaceutique est évoqué qui fait des fortunes sur le malheur des gens ! Les aberrations du DSM-IV sont connues ! On a tendance à trop privilégié la médication même si il faut reconnaître qu'en psychiatrie, les neuroleptiques ont été un progrès mais ils ne suffisent pas et ne remplacent pas la verbalisation !

    Le suivi psychologique est aussi important que la médication ! La société et le système hospitalier ont de graves lacunes dans certains domaines mais les choses se sont améliorées un temps en 2002 avec une nouvelle loi.

    Le livre de Zarifian montre que des psychiatres ont une bonne expertise/évaluation de la situation ! Dommage qu'à l'époque, 1993, les subordonnés de Zarifian n'appliquent pas ses théories dans le propre hôpital dont il était directeur ! Mais on progresse...

    A bientôt !


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