• La fin de l'intellectuel français ? - Shlomo Sand

    Fini le temps des Sartre et des Foucault, pauvres de nous, nous nous retrouvons à notre époque avec des BHL, des Finkielkraut et des Onfray ! Là où jadis les "intellectuels" défiaient le Pouvoir, ils en sont aujourd'hui pour la plupart les relais dans une ambiance de décadence supposée de l'Occident ! Pensée décliniste qui n'est pas nouvelle mais avais déjà court dans les années 1930 - on sait à quoi ça a conduit !

    Shlomo Sand est un Historien Israelien aux analyses fort pertinentes qui s'interroge dans son ouvrage La fin de l'intellectuel français ? - sous-titré "De Zola à Houellebecq"  - sur ce qu'il en est du paysage culturel à notre époque et retrace son évolution en prenant comme bornes le "J'accuse" de Zola et le "J'accuse" de Houellebecq !

    Un livre fort intéressant donc ! On commence bien évidemment avec l'Affaire Dreyfus - affaire qui connut deux temps, un premier procès puis un second en réhabilitation de cet officier d'origine juive accusé de trahison en faveur de l'Allemagne, affaire montée de toutes pièces dans une ambiance d'antisémitisme nourri par des brûlots La France juive de Drumont. C'est à cette occasion qu'est né le terme "Intellectuel" quoi qu'il fut apparu d'abord dans un écrit de Saint-Simon.

    Sand retrace le déroulé de l'Affaire Dreyfus mais surtout énumère les camps en présence, montre le paysage politique et intellectuel de la France avant la Première Guerre mondiale. Tout part de là !

    Par la suite, l'auteur nous expose un certain nombre de figures de l'Histoire de la vie intellectuelle depuis le XVIIIème siècle, organisées en binômes d'opposés. On aura donc Rousseau et Voltaire, Tocqueville et Comte, Sartre et Aron ou encore Bourdieu et Foucault. Je ne reviens pas sur les idées de ces penseurs car aurais l'occasion sur ce blog de consacrer des billets à leurs oeuvres !

    On a aussi un passionnant chapitre sur l'influence du Marxisme en France et sur l'ambiance "intellectuelle" de l'Entre-deux-guerres avec des auteurs comme Benda. Mais je retiens de ce chapitre surtout l'évocation du livre de Paul Nizan, militant communiste, paru en 1932 et intitulé Les Chiens de garde. Dans ces pages, il est question de la collusion des clercs avec le pouvoir ou comment sous couvert d'une fausse objectivité et d'une fausse indépendance, les intellectuels défendent l'institution. Car il ne faut pas oublier que ces grands penseurs restent avant tout des hommes avec des intérêts, passions et jalousies humaines ! Ces aspects n'ont pas changé en 2023, il n'y a qu'à voir les journalistes de BFMerde ou la panier de crabes qu'est l'Université française ou le CNRS !

    On aborde ensuite les heures sombres de cette Histoire avec la période de la Seconde Guerre mondiale et de la Collaboration et il est question de Drieu la Rochelle, de Brasillach et de Rebatet ! Si le fascisme et la national-socialisme n'ont jamais fait souche en France dans les années 1930, ils ont tout de même fait quelques adeptes qui pensaient "restaurer une France forte et pure" mais qui en réalité servaient aussi des intérêts personnels d'ascension sociale rapide.

    On approche ensuite de la période contemporaine qui voit la fin des derniers grands intellectuels qui ne laisseront pas d'héritiers ! Ils laissent la place aux communicants, à l'ère des mass-média (puis l'arrivée d'Internet). Dans le même temps, la France s'enfonce dans un marasme économique et une désillusion politique ! La création de l'Europe et la mondialisation amplifie les craintes !

    Dans ce contexte d'aujourd'hui, les intellectuels de promoteurs de révolutions deviennent des apôtres réactionnaires à l'image d'un Zemmour, d'un Finkielkraut et même d'un Onfray. Ils plaident pour une "France de naguère" qui n'a jamais existé que dans leurs esprits !

    C'est dans ce contexte que Zemmour écrit Le Suicide français  et Houellebecq son livre islamophobe Soumission  (que j'avoue avoir encensé à l'époque avant que Shlomo Sand ne m'ouvre les yeux !). L'auteur de notre essai consacre l'épilogue de son livre à l'Islamophobie évoque Charlie Hebdo et le Bataclan en 2015. Il pointe le caractère outrancier des caricatures du magazines satirique qui ne visent pas que les djihadistes mais blessent aussi le "musulman de base" qui ne souhaite que vivre son culte de manière sereine et privé.

    Il parait ici évident qu'il est plus facile de désigner des boucs-émissaires, les musulman et les étrangers comme responsable du marasme de nos société que d'aller demander des comptes à nos dirigeants ou de critiquer le système capitaliste devenu hégémonique depuis 1989 et la Chute du Bloc de l'Est (mais c'est en train de changer avec les Gilets jaunes et la prise de conscience des classes moyennes). Cette stratégie du bouc-émissaire, on l'a déjà vu à l'oeuvre dans les années 1930 et 1940 en Europe avec les Juifs stigmatisés par les Nazis !

    Mais Shlomo Sand veut toutefois continuer d'espérer en un renouveau de la vie intellectuelle qui apporterait des solutions pour changer la vie même si le tableau est plûtot noir. En attendant en l'espace d'environs 260 pages, il nous a proposé une brillante étude que je vous recommande fortement si vous vous intéressez plus particulièrement à tout ce qui relève de l'Histoire des Idées !

    A bientôt !

     

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